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Robert Villate.
Foch à la Marne.

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CHAPITRE III.
LE DEMI-TOUR (5 septembre).

LES ORDRES DE L'ARMÉE
POUR LA JOURNÉE DU 5 SEPTEMBRE.

L'ordre général n° 6, du général Joffre, prescrivant la reprise de l'offensive, transmis par télégramme, parvient au quartier général de la 9e armée, à Fère-Champenoise, vers 2 h. 30.

A ce moment, les mouvements vers le sud des unités de cette armée sont commencés; mais ces unités sont encore loin de la ligne sur laquelle elles doivent s'arrêter, même dans la situation nouvelle envisagée par l'ordre du général en chef. Il n'y a donc aucune urgence à leur envoyer des ordres. Mais on est si heureux de l'ordre reçu, et il y a, au point de vue moral, un tel intérêt à aviser les troupes de ce changement dans la situation, attendu par tous avec tant d'impatience, qu'on avise aussitôt corps d'armée et divisions de la fin de la retraite.

Cela fait l'objet d'une série d'ordres expédiés entre 5 heures et 5 h. 15.

5 heures, ordre au 9e corps.
En vue de profiter de la situation aventurée de la Ire armée allemande et dans le but de réaliser un dispositif permettant de passer à l'offensive le 6, la 9e armée arrêtera son mouvement de retraite (20). Le 9e corps arrêtera sa marche de façon qu'aucun de ses éléments combattants ne dépasse, au sud, la ligne Connantre---Œuvy.

Il maintiendra ses arrière-gardes sur la ligne Aulnay-aux-Planches---Morains-le-Petit---Ecury.

La 52e division sera maintenue dans la région Corroy-Courcelles, au sud de la Maurienne.

On remarquera cette précaution de maintenir la division de réserve assez éloignée de la première ligne, pour ne pas subir les émotions de la lutte; cette mesure a pour but, non seulement de lui permettre de reprendre quelque cohésion mais de lui assurer toute liberté de mouvement éventuelle. C'est la condition à laquelle doit satisfaire tout emplacement de réserve. Nous verrons, les jours suivants, à quels dangers peut conduire l'inobservation de cette règle.
5 h. 05, ordre au 11e corps.
Le 11e corps, se liant à gauche avec le 9e corps, dont. les arrière-gardes seront sur la, ligne... (voir ci-dessus), arrêtera le gros de ses colonnes au sud de la Somme. Il disposera de l'artillerie de la 60e D. R.
Il n'est sans doute pas sans intérêt de noter ce rattachement de l'artillerie d'une- division de réserve aux troupes maintenues en première ligne, tandis que l'infanterie de cette même division est laissée à l'arrière; on se rappelle qu'en 1914, par suite de diverses mesures d'organisation et d'instruction dans le détail desquelles il est impossible d'entrer ici (organisation des batteries et des groupes de renforcement), l'artillerie des divisions de réserve possédait, dès la mobilisation, une cohésion qui manquait à l'infanterie de ces divisions : dès le premier jour, cette artillerie tint utilement sa place en première ligne; celle de la 60e D. R., en particulier, s'était comportée à la bataille de la Meuse de telle façon qu'elle avait donné aux Allemands l'impression de la présence d'une artillerie lourde.

5 h. 15, ordre à la 42e division.
La 42e division arrêtera son mouvement de manière qu'aucun élément combattant ne se trouve au sud de la ligne Allemant---Fère-Champenoise. Elle tiendra les débouchés des marais de Saint-Gond entre Bannes et Oyes.
5 h. 15, ordre à la 9e division de cavalerie.
La 9e division de cavalerie, désormais aux ordres de la 9e armée, prendra ses dispositions pour couvrir à droite le dispositif que prend aujourd'hui l'armée en vue de passer à l'offensive le 6. Ce dispositif amènera l'armée sur un front, sensiblement marqué par la ligne des marais de Saint-Gond et le cours de la Somme entre Ecury et Sommesous. Elle rendra compte de ses dispositions.
Telle est en effet, la pénurie des officiers d'état-major, qu'il sera impossible d'en détacher auprès de toutes les unités pour constater l'exécution des ordres; il faudra,. pour certaines, et notamment pour la division de cavalerie, s'en rapporter aux comptes rendus des subordonnés, ce qui ne sera pas sans, inconvénients.

Le dispositif qui doit résulter de ces dïfférents ordres, sera, en première ligne, les quatre divisions des 9e et 11e corps, établies sur un front d'une vingtaine de kilomètres, entre Aulnay-aux-Planches et Sommesous, et en deuxième ligne ou en réserve, deux divisions; il sera couvert à droite, vers l'est, par la 9e division de cavalerie; à gauche, vers l'ouest, pur la 42e division au sud des marais de Saint-Gond.

Ce dispositif répond à la lettre des ordres du général en chef, puisqu'il couvre la droite de la 5e armée, en position sur les plateaux de la Brie, et qu'il tient les débouchés sud des marais de Saint-Gond. Mais il néglige une partie de ces ordres, puisqu'il ne porte aucun élément sur les. plateaux au nord de Sézanne, et il en traduit insuffisamment l'esprit, puisqu'il n'envisage pas une aide efficace à une avance de la 5e armée. Que l'aile droite de celle-ci progresse au nord de Sézanne, ne risque-t-elle pas, en effet, d'être prise en flanc par une artillerie en position sur les hauteurs au nord des marais?...

Le général Foch, dont le cerveau est en perpétuel travail, et qui vit---comme doit faire tout chef---les ordres qu'il a donnés, se rend compte de ces lacunes. Le dispositif prévu par ses ordres, de 5 heures est défensif; pourqu'il devienne offensif, il faut tenir non les débouchés sud, mais les débouchés nord des marais de Saint-Gond.

Mais ce serait évidemment une solution trop simpliste de se borner à pousser au nord des marais les éléments primitivement disposés au sud; il ne peut être question de laisser la seule 42e division sur les hauteurs de Congy et de Toulon, avec, en arrière d'elle, l'obstacle des marais!

C'est donc tout le, dispositif de l'armée qu'il va falloir remanier : c'est tout le 99 corps que le général Foch polissera au nord des marais; la 42e division deviendra ainsi disponible pour attaquer en direction du Petit-Morin, à l'ouest des marais, en liaison avec la 5e armée.

Cette décision fait l'objet d'un nouvel ordre préparatoire, qui est expédié à 9 h. 30 :

En vue de couvrir la droite de la 5' armée, dont le 10e corps attaquera demain dans la direction générale Sézanne --Montmirail et à l'est :

a) La 42e division fera tenir, dès ce soir, par une forte avant-garde le front La Villeneuve-les-Charleville---Soizy-aux-Bois.

Elle disposera son stationnement de manière à pouvoir agir demain dans la direction La Villeneuve-les-Charleville --Vauchamps (est de Montmirail).

(L'avant-garde du 10e corps sera ce soir aux Essarts-lès-Sézanne) ;

b) Le 9e corps fera occuper ce soir, par de fortes avant-gardes, Congy et Toulon-la-Montagne.
Il disposera son stationnement en vue de pouvoir agir demain matin par Baye et par Etoges.

Il assurera les liaisons avec la 42e division par Villevenard et avec le 11e corps à Morains-le-Petit, qu'il continuera à occuper;

c) Le 11e corps restera dans la situation qu'il occupe actuellement sur la rive sud de la Somme, vers Normée;

d) Les avant-gardes organiseront solidement leurs positions (21).

La décision est extrêmement hardie, car elle a pour conséquence de laisser à un seul corps d'armée, et au plus fatigué, le 11e, la garde du front précédemment confiée à deux corps d'armée. Mais c'est la solution qui répond le mieux aux intentions du général en chef et la plus favorable aux succès de l'armée voisine. Le général Foch n'hésite pas à sacrifier sa propre sécurité aux exigences de la discipline intellectuelle et de la camaraderie de combat.

Voici, heureusement, qu'arrivent, pour étayer ce dispositif trop léger, les éléments du 9e corps, jusque-là restés en Lorraine, et que l'Instruction générale n° 5 (celle qui a transformé le détachement d'armée en armée et fixé sa composition) a placés sous les ordres du général Foch à partir de leur débarquement.

Le général Foch dispose de deux groupes de camions; il va faire transporter les premiers éléments débarqués de la 18e division, c'est-à-dire les 32e et 114e régiments d'infanterie, dont l'arrivée dans la région de Troyes lui est annoncée, vers Thaas et Angluzelles, sensiblement derrière son centre. Pour gagner du temps, il expédie à Troyes son sous-chef d'état-major, avec mission de donner sur place les ordres nécessaires : les embarquements en auto commencent entre 14 et 15 heures, au sud de Troyes.

Quant aux autres éléments, il demande que, en raison de l'arrêt du mouvement de recul, ils soient poussés en chemin de fer sur Arcis-sur-Aube, de façon à pouvoir « rallier par une marche » la même région Thaas---Angluzelle.

Pour être plus tranquille sur sa droite, où seule, la 9e division de cavalerie doit tenir le trou qui existe entre la 4e et la 9e armée, le général Foch est entré en relations, à 9 h. 30, avec le général de Langle de Cary; après lui avoir exposé les grandes lignes de sa manoeuvre, il lui demande « de vouloir bien appuyer (sa) droite en agissant par la route Châlons---Arcis contre les forces ennemies qui déboucheraient de Châlons ». Mais le commandant de la 4e armée, étiré lui-même sur un front considérable, ne lui donnera aucune illusion sur l'appui qu'il pourra lui fournir.

... La 4e armée,---répondra-t-il à 19 h. 30,---prend ses dispositions pour faire tête à l'ennemi sur le front Courdemanges---Vauclerc---Dompremy---Pargny-sur-Saulx---Sermaize. Son 17e corps... tenant par un détachement la crête départementale du camp (de Mailly.

La 4e armée, s'attendant à être attaquée sur tout son front et devant en outre lier son action à celle de la 3' armée, il lui est impossible d'appuyer la droite de la 9e contre les forces ennemies pouvant déboucher de Châlons, direction Arcis.

Sans attendre cette réponse, sans doute trop prévue, le général Foch donne, dans l'après-midi (17 h. 45) son ordre pour la journée du 6 :
En vue de couvrir la droite de la 5e armée et d'appuyer son offensive vers le nord-ouest...

La 12e division, liant son attaque à celle du 10e corps, qui marchera de Sézanne sur Montmirail et à l'est, se portera de La Villeneuve-les-Charleville et de Saint-Prix dans la direction générale de Vauchamps et de Janvillers, pour conquérir et tenir le Petit-Morin. Elle se maintiendra à l'est de la ligne Lachy---Charleville.

Le 9e corps s'établira défensivement sur la ligne des marais de Saint-Gond, de Oyes (inclus) à Bannes (inclus). Il maintiendra des avant-gardes fortement organisées au nord des marais. Il tiendra des forces prêtes à déboucher vers Champaubert. Il disposera de la 52e division de réserve.

Le 11e corps d'armée, disposant de la 60e division de réserve, s'établira défensivement de Morains-le-Petit à Lenharrée, pour barrer indiscutablement à l'ennemi les routes venant de Châlons et de Vertus.

La 9e division de cavalerie, à Vatry, tiendra la direction de Châlons à Sommesous, avec repli éventuel sur Sommesous.

Poste de commandement à Pleurs à partir de 8 heures...

Cette fois, nous sommes bien dans le sens des intentions du général en chef, qui n'a nullement en vue, nous le rappelons, l'offensive de toutes ses armées, mais seulement, pour le moment, celle de ses armées de gauche. Liée à une armée sur la défensive à sa droite, la 9e armée reste, de ce côté, sur la défensive; sa gauche, liée à une armée qui attaque, attaquera également; au centre, on tiendra les débouchés permettant de se porter en avant quand la situation le permettra et on se préparera à ce mouvement.

* * *

MOUVEMENTS DE LA JOURNÉE DU 5 SEPTEMBRE.

Croquis n° II
 

LA 42e DIVISION.

La 42e division marchait en deux colonnes, l'une par Aulnizeux-sur-Bannes, Connantre et Pleurs, l'autre, par Joches sur Broussy et Linthelles.

Au reçu du premier ordre,---de 5 h. 15,---le général Grossetti décide d'arrêter les arrière-gardes, l'une vers. Aulnizeux, tenant la croupe de la Ferme. la Chapelle et les. bois à l'est de Vert-la-Gravelle, l'autre vers Joches, tenant le couloir entre le Clos-Prieur et le bois dé Toulon. Les gros devaient exécuter une halte gardée vers Bannes et Menil-Broussy et entre Reuves et Broussy-le-Grand. L'ordre ajoute que « la nouvelle zone de stationnement sera probablement fixée aux abords de ces emplacements de grand'halte ».

A 10 heures, le commandant de la division précise ainsi la mission des arrière-gardes :

La cavalerie vous couvre sur le front Etoges---Vertus. Vous auriez à lui servir de repli le cas échéant.

En cas d'attaque, ne résistez que le temps suffisant pour donner au gros le temps de prendre ses dispositions de combat.

Ainsi, n'agir que comme des avant-postes.

Ne tenir que faiblement à Vert-la-Gravelle et Coizard, la résistance pouvant être prolongée à Aulnizeux, pour permettre l'entrée en action de l'artillerie qui viendrait au sud de Bannes...

Le 19e bataillon aura un repli à la Verrerie et se replierait, le cas échéant, vers Broussy-le-Grand.

Mon intention serait de résister à outrance au sud des marais.

Mais, vers 11 heures, il est en train de voir passer le 151e régiment d'infanterie près de Bannes, quand il reçoit le second ordre du général Foch; il modifie ses instructions antérieures :
Le 162e va se porter par Reuves sur Oyes et s'orienter pour continuer sur Soizy-aux-Bois.

Le 151e se portera à Montgivroux et s'orientera pour continuer dans la direction de La Villeneuve-les-Charleville.

Le 16e bataillon viendra à Reuves.

Mouvement exécutoire de suite pour le 162e et à partir de 11 h. 15 pour le 151e et le 16' bataillon.

Ces mouvements sont destinés à préparer l'offensive.

La 84e brigade aura encore à se porter en avant dans la soirée sur le front La Villeneuve---Soizy...

La grand'halte terminée, tous les éléments de la 83e brigade seront dirigés sur Broussy-le-Petit, où ils recevront de nouveaux ordres. Rappeler notamment les bataillons de chasseurs qui sont ait nord des marais.

Un ordre ultérieur précise le rôle de la 84e brigade:
Si la marche en avant s'opère sans difficulté, ou si l'ennemi cède, la 84e brigade réalisera le dispositif prévu et occupera avec deux régiments, avant-garde de la division, La Villeneuve et la croupe du bois de Botrait au nord de Soizy-aux-Bois, qui constitueront la ligne de résistance à ne pas abandonner.

La ligne des grand'gardes tiendra Saint-Prix, ferme Colléard, Les Forges, les Culots et le saillant nord-ouest du bois de l'Homme Blanc, le signal 213, et ultérieurement Charleville, où l'on cherchera la liaison avec le 10e corps.

Les régiments se mettent en mouvement. De temps en temps, on entend des coups de feu au nord des marais : c'est le 10e chasseurs qui, dans la région de Villevenard, bouscule des patrouilles de cavalerie allemande. La route Bannes---Reuves est encombrée de charrettes et de voitures de paysans. Interrogés par le colonel Deville, ces paysans déclarent que l'ennemi descend de Baye et a occupé Talus-Saint-Prix.

A 15 h. 30, le général Grossetti ayant appris que « l'ennemi aurait du monde à Saint-Prix, cyclistes venant du nord et qu'il a poursuivi la 20e division qui s'est repliée par Villevenard sur Oyes », donne l'ordre à la 42e division de « se porter en avant et d'attaquer pour occuper la ligne des avant-postes qu'elle doit tenir » :

La brigade Trouchaud attaquera avec ses éléments de droite sur la croupe du bois Botrait, premier objectif, de manière à occuper :finalement Saint-Prix, le bois Botrait et Soizy-aux-Bois; avec ses éléments de gauche, Montgivroux, de manière à tourner le bois de Saint-Gond, direction ultérieure La Villeneuve-les-Charleville.

Artillerie. 61e portera d'abord trois groupes dans la région Oyes, Reuves, Mondement, Montgivroux; mission : appuyer le mouvement en avant de l'infanterie; objectif, Saint-Prix et toute position occupée par l'ennemi.

Deux autres groupes d'artillerie (46e) viendront immédiatement au sud-ouest de Broussy-le-Petit, en position d'attente sur roues, prêts à s'engager.

La brigade Krien serrera sur Broussy-le-Petit, détachement au bois d'Allemant, le reste en réserve de division. Surveiller tous les passages des marais de Saint-Gond.

Cavalerie, par Coizard, Courjeonnet, Villevenard, sur la ligne de retraite du détachement de Saint-Prix, éclairant vers Champaubert, Baye; chercher la liaison avec le 9e corps.

Ces mouvements s'effectuent sans difficultés : l'avant-garde chasse quelques fractions de cavalerie, appuyées par de l'infanterie et un peu d'artillerie, qui s'opposaient à l'occupation du front Villeneuve-les-Charleville, Saint-Prix, et atteint à la nuit les objectifs qui lui ont été assignés. L'artillerie ouvre le feu à plusieurs reprises sur des objectifs assez imprécis, colonnes d'artillerie aperçues entre Courjeonnet et Congy, artillerie en batterie dans le bois des Usages; à la nuit, elle va bivouaquer aux environs du château de Mondement et à l'ouest. L'artillerie ennemie a riposté assez faiblement sans nous faire subir de pertes sensibles. Quant au 10e chasseurs, après avoir patrouillé, au nord des marais, il est repassé au sud en fin de journée, gagnant Broussy-le-Petit, puis Allemant, dans un ordre parfait, malgré le tir de l'artillerie ennemie, les capitaines gardant leurs intervalles comme sur le terrain de manoeuvres (22).

Pendant la nuit, l'ennemi exécute un tir lent de bombardement, dont les résultats sont faibles. Sur les hauteurs, au nord des marais, on aperçoit les lueurs de nombreux, projecteurs allemands.

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LE 9e CORPS.

Conformément aux ordres antérieurs, le 9e corps a continué dans la nuit son mouvement vers le sud; la 17e division marche par la route Voipreux---Bergères-les-Vertus---Pierre-Morains---Ecury-le-Repos---Fère-Champenoise (partie est)---Œuvy, couverte par une arrière-garde, aux ordres du colonel Eon, comprenant le 135e régiment d'infanterie, un groupe d'artillerie, la compagnie du génie, l'escadron divisionnaire; la division du Maroc, par Bergères, Fère-Champenoise (partie ouest), Faux, couverte par un régiment, un groupe d'artillerie et deux escadrons. Le 7e hussards, laissé d'abord en arrière sur la ligne Vertus---Chaintrix, couvre le front de marche en poussant ses reconnaissances sur toutes les routes vers la Marne.

La 52e, division doit franchir la ligne Colligny---Pierre-Moirains dès 3 heures, pour se rendre par Œuvy et Corroy, vers Boulages, Plancy et Viâpres sur l'Aube.

A 5 heures, les renseignements du 7e hussards annoncent que l'ennemi ne se montre que par des patrouilles peu mordantes et que le 11e corps poursuit sans incident sa marche vers le sud.

L'ordre préparatoire de l'armée ne touche guère le corps d'armée que quand les têtes de colonnes arrivent à hauteur de Fère-Champenoise. Cet ordre ne surprend personne, car on l'attend et on l'espère depuis plusieurs jours. Ce fut, en effet, la grande habileté du général Joffre de ne pas laisser ses troupes sous l'impression de la défaite, mais de leur avoir, dès la première heure, annoncé et fait espérer cette volte-face en leur expliquant sa man?uvre : prendre du champ pour se réorganiser, puis se reporter en avant. Cela nous paraît tout simple aujourd'hui. Il faut bien admettre que cela ne l'était pas tellement, puisque les Allemands ne l'avaient pas prévu, et que même, ils auront besoin de quelques jours pour se rendre à l'évidence!...

A 6 11. 20 et à 6 h. 45, le général commandant le 9e corps expédie ses ordres pour le demi-tour. Ces ordres sont très simples (23) :

La division du Maroc arrêtera ses gros dans la région de Fère-Champenoise. Arrière-gardes à Aulnay-aux-Planches, Morains-le-Petit. Artillerie en surveillance sur Colligny, grand'route, Pierre-Morains.

La 17e division arrêtera ses gros au sud de la Vaure, entre le moulin de Connantray et Œuvy. Arrière-garde à Ecury-le-Repos. Artillerie en surveillance sur Pierre-Morains, Clamanges, route de Villeselleux.

Avant-postes poussés au nord de la ligne des arrière-gardes surveillant la zone du corps d'armée, particulièrement dans la direction de Clamanges...

Les arrière-gardes se retrancheront...

La 52" division s'installera dans la région Correy, Courcelles, Fresnay, Faux, artillerie au nord.

P. C. du 9e corps : Fère-Champenoise.

L'ordre de l'armée, de 9 h. 30, prescrivait un mouvement autrement compliqué. Il impose non seulement, comme le précédent, un changement d'orientation, mais une translation latérale qui ne va pas sans difficultés. : l'état-major du corps d'armée paraît avoir été assez embarrassé. Ce qui le prouve, c'est que, bien qu'ayant été touché immédiatement par l'ordre de l'armée, puisque les deux P. C. sont voisins à Fère-Champenoise, il n'expédiera son ordre qu'à 11 heures. Encore celui-ci a-t-il été simplifié à l'extrême : il se borne à transmettre l'ordre de l'armée, en délimitant la tâche de chaque division, sans même régler les détails de la relève indispensable :
La division du Maroc poussera dès que possible un régiment sur Congy par Bannes et Coizard. La division du Maroc aura dégagé Bannes pour 15 heures.

La 17e division jettera une grosse avant-garde dans Toulon-la-Montagne, laissant de petits détachements à Vert-la-Gravelle, Aulnizeux, Aulnay-aux-Planches, Morains-le-Petit.

Les gros se rassembleront :

Division du Maroc dans la région Broussy-le-Grand., Broussy-le-Petit

17e division, dans la région Bannes, Fère-Champenoise.

Le 7e hussards poussera des reconnaissances à la lisière du bois de Vertus et cantonnera à Joches.

Cet ordre est, il est vrai, suivi à midi d'un ordre plus complet, trop complet, dirions-nous même volontiers, en lisant les premiers paragraphes, qui, sans doute, par leur solennité, marquent le début d'une nouvelle phase et l'entrée dans la bataille, mais qui, en donnant tout l'ordre de bataille de l'armée, sont d'une grave imprudence
Ordre général n° 33.
Fère-Champenoise, 5 septembre, 1-9 heures.

I.---Le 9e corps fait partie de la 9e armée (9e et IIe C. A., 42e D. I., division du Maroc, 52e et 60e D. R, 9e D. C.), sous les ordres du général Foch.

II.---En vue de couvrir la droite de la 5e armée, dont le 10e corps attaquera demain dans la direction générale Sézanne, Montmirail et à l'est, le 9e corps aura ce soir de fortes avant-gardes à Congy et Toulon-la-Montagne et ses gros prêts à agir demain par Baye ou par Etoges; liaison à gauche avec la 42e division, dont les avant-gardes sont à Villeneuve-les-Charleville, Soizy-aux-Bois, à droite avec le IIe corps à Morains-le-Petit.

III.---En conséquence :

1° La 17' division relèvera, à Morains-le-Petit ' le détachement de la division du Maroc (un bataillon avec une fraction de cavalerie); cet élément aura pour mission de tenir jusqu'à nouvel ordre la route Fère-Champenoise---Vertus et d'assurer la liaison avec le IIe corps par Ecury-le-Repos.

2° La division du Maroc (artillerie de corps rattachée à cette division) dirigera une forte avant-garde (1 régiment, 1 groupe, compagnie du génie) sur Congy. Son gros s'installera à Courjeonnet, Broussy-le-Grand (Q. G). Détachement à Villevenard (liaison avec la 42e D. I.).

Elle devra avoir dépassé Bannes pour 17 heures.

3° La 17' division poussera une forte avant-garde sur Toulon-la-Montagne, son gros à Coizard, Bannes et Fère (Q. G.). Elle tiendra, par de petits détachements, les routes de Vert-la-Gravelle, Aulnizeux et Aulnay-aux-Planches. Sa tête pourra passer à Bannes pour 17 heures.

4° Les avant-gardes organiseront solidement leurs positions et pousseront leurs avant-postes jusqu'à la route nationale n° 33. Liaison entre les deux divisions sur le ruisseau de Cubersault.

5° Le 7e hussards cantonnera à Joches et, dès le 6 au matin, poussera des reconnaissances sur les routes venant de la direction de la Marne et aboutissant à Etoges et Montmort.

6° La compagnie du génie de corps suivra le mouvement de la. 17e D. I. et cantonnera à Fère-Champenoise.

7° La 52" D. R. occupera ce soir Connantre (Q. G.) et Corroy. Artillerie à Connantre.

IV.---Le P. C. du corps d'armée continuera à fonctionner à Fère-Champenoise jusqu'à 18 heures.
Q. G. à Fère-Champenoise à partir de 15 heures.
V.---Trains régimentaires à la disposition des divisions, refoulés, après distribution en queue des cantonnements.

VI.---P. C. sans changement.

VII.---Liaisons : postes de C. A. : Fère-Champenoise (ouvert), Connantre (à partir de 15 heures).

* * *

LA DIVISION DU MAROC.

Si, du corps d'armée, nous passons maintenant aux divisions pour suivre l'exécution de cet ordre, nous aurons encore plus nettement la sensation de l'étonnement, sinon du trouble, que causa ce mouvement de flanc à exécuter en présence de l'ennemi et nécessitant, pour certaines unités au moins, la traversée des marais.

A ce moment, la division du Maroc est arrêtée. Ses avant-postes ont été poussés au bois situé à 1 kilomètre nord de Morains-le-Petit et vers la pointe nord des marais de Saint-Gond, entre Aulnizeux et Aulnay. L'arrière-garde, aux ordres du général Blondlat, faisant en somme fonction de réserve d'avant-postes et comprenant le 1er régiment de zouaves, deux groupes d'artillerie et la compagnie du génie divisionnaire, tient le front Aulnay-aux-Planches---Morains-le-Petit, son artillerie prête à intervenir dans les directions de Pierre-Morains, Bergères-les-Vertus et Colligny. Le gros de la division est établi : le second régiment de la brigade Blondlat (régiment d'infanterie coloniale, réduit à un bataillon) dans les bois au sud de Morains-le-Petit; le régiment Fellert à cheval sur la route de Fère-Champenoise à Normée, à 1 kilomètre environ au nord-est de Fère; le régiment Cros le long de la voie ferrée, à 1.500 mètres au nord de Fère, entre la station et la route de Morains; l'artillerie à cheval sur la route de Morains, à 800 mètres environ au nord de Fère.

Il eût été simple et logique de prendre un des deux régiments disponibles au nord de Fère-Champenoise, pour en constituer la nouvelle avant-garde à pousser sur TouIon-la-Montagne : les ordres lui auraient été donnés aussitôt et le mouvement aurait pu commencer sans perte de temps; il n'y aurait pas eu de déplacement latéral en présence de l'ennemi; la marche aurait été couverte par l'ancienne avant-garde pendant la période critique du franchissement des marais; cette ancienne avant-garde aurait ensuite rejoint le gros.

La 17e division eût exécuté un mouvement analogue.

Or, il est curieux de constater que, ni à la division du Maroc ni à la 17e division, on n'adopte cette solution, qui nous semble aujourd'hui la solution classique : dans chacune des deux divisions, au lieu de puiser dans le gros pour constituer la nouvelle avant-garde, c'est l'ancienne avant-garde qu'on se borne à déplacer parallèlement à elle-même. Sans doute faut-il attribuer ce fait à la différence de fatigue ou d'encadrement des diverses unités, ou peut-être à un respect trop strict de la loi d'alternance des unités en première ligne! Il y a des cas nombreux où les exigences rationnelles de la théorie et de la tactique doivent céder le pas aux considérations de fait (24).

Les conséquences n'en seront pas moins fâcheuses dans les deux cas, à commencer par un retard considérable dans la mise en place du nouveau dispositif.

A 14 heures, le général Humbert a donné les ordres suivants (25) :

Ordre général n° 44.

I.---La division du Maroc fait partie de la 9e armée (9e et 11e corps, 42e D. I., division du Maroc, 52e D. B., 9e D. C.) sous les ordres du général Foch.

II.---Les circonstances favorables permettant de reprendre l'offensive dès demain matin, la division du Maroc exécutera dès ce soir les mouvements suivants, destinés à la préparation de la marche en avant.

L'arrière-garde actuelle, aux ordres du général Blondlat, se portera à Congy par Aulnizeux, Coizard et Joches.

La cavalerie éclairera sa marche.

Le régiment colonial gagnera Courjeonnet par Bannes et Coizard; il poussera une compagnie à Villevenard (liaison avec la 42e A I.).

Les régiments Cros et Fellert et l'artillerie de corps se rendront à Broussy-le-Grand par le chemin de terre du Mont Août, passant par la cote 151; un guide accompagnera la tête de la colonne (régiment Cros), qui partira le plus tôt possible. L'artillerie le rejoindra, au besoin au trot; le régiment Fellert, puis l'ambulance fermeront la marche.

Le Q. G. s'installera à Broussy-le-Grand...

Le régiment de zouaves, qui est aux avant-postes au nord de Morains-le-Petit, attend naturellement, quoique l'ordre de la division ne le lui ait pas dit, d'être relevé par la 17e division, avant de se mettre en mouvement. A ce moment, l'ennemi, signalé à 15 heures comme débouchant de Vertus en direction de Vert-la-Gravelle, donne des inquiétudes. Le général Blondlat hésite à faire passer son avant-garde par le nord des marais : ce serait aventurer son artillerie. Il décide que toute la brigade passera par le sud des marais et par Bannes et Coizard, précédée par le bataillon d'infanterie coloniale Sautel.

Un compte rendu du général Blondlat, expédié de Bannes dans la soirée, donne la physionomie de cette marche et montre bien les difficultés et le désordre inhérents à un changement d'attitude aussi soudain et aussi radical.

En arrivant à Bannes vers 7 heures [du soir], après une marche exécutée sans à-coup et correctement, j'ai trouvé une situation extrêmement embrouillée.

Le commandant Martin (groupe d'artillerie coloniale,) me rendait compte qu'il apercevait de nombreux éclatements d'obus en avant et à gauche de sa route de marche, et que, n'étant plus en liaison avec le bataillon Sautel qui avait marché très vite, il s'arrêtait à la sortie ouest du village à 18 h. 30.---A 18 h. 45, il m'écrivait que, d'après la cavalerie cantonnée à Bannes, Joches et Coizard étaient occupés par l'ennemi.

En effet, le colonel Desbrières lut rendait compte que « jusqu'à la nuit, les obus ont éclaté sur le front Saint-Prix---Reuves---Coizard et Aulnizeux. Joches fortement occupé. Position ennemie très forte. Peu ou pas d'abris dans tout le terrain au sud des marais ».

Un instant après, j'apprenais qu'un groupe égaré du 33e était venu s'accoler aux miens, après être allé tomber sur l'ennemi à Vert-la-Gravelle.

Enfin, je viens d'apprendre par un cavalier que Sautel a occupé et dépassé Coizard avec de l'artillerie venue de je ne sais où.

Quoi qu'il en soit, me voilà fort empêtré avec plus de trois groupes d'artillerie, dont je ne puis évidemment pas assurer la garde avec mes trois bataillons. Dans ces conditions, je n'ose pousser à fond sur Congy, que tous les renseignements disent occupé.

Je me suis établi solidement à Bannes. Je vais envoyer aux renseignements vers Sautel et je vais envoyer reconnaître les directions de Courjeonnet, Congy, Vert-la-Gravelle.

... Je prescris à l'artillerie qui a suivi Sautel de revenir à Bannes, à moins qu'elle n'ait des ordres de tir.

Les autres éléments de la division du Maroc exécutent leur mouvement sans incident; mais c'est ainsi,---et le fait est à retenir, parce qu'on a tendance, dans les exercices du temps de paix, à attribuer aux troupes une vitesse de mouvement beaucoup plus rapide,---c'est ainsi qu'un ordre donné à Fère-Champenoise, à 9 h. 30, à des troupes qui sont sur place, ne réussit pas, en dépit de la valeur indiscutable du commandement et des troupes, à mener ces troupes avant la nuit à moins de 15 kilomètres de là!...

* * *

LA 17e DIVISION.

A la 17e division, l'ordre de mouvement vers le nord a été donné à 13 heures. Le colonel Eon doit occuper Vert-la-Gravelle avec le 135e d'infanterie, renforcé par un groupe d'artillerie; il doit avoir, dès ce soir, un bataillon à Toulon-la-Montagne et des éléments au château de la Gravelle et à Aulnizeux. Il doit être en mesure de s'installer au point du jour, avec tout son détachement, à Toulon-la-Montagne, afin d'assurer le débouché au nord des marais. Le gros de la 17e division s'établira entre Bannes et Fère-Champenoise; le 77e à Bannes, les 68e et 90e à Fère-Champenoise, un régiment sur chaque rive de la Vaure, tandis qu'un bataillon du 32e---le seul bataillon de ce régiment qui avait été transporté de Lorraine dans le premier courant de transport---ira relever à Morains-le-Petit, pour 17 heures, les unités de la division du Maroc. Ce bataillon, auquel est adjoint l'escadron divisionnaire, se reliera vers Normée au 11e corps; il surveillera les directions de Bergères-les-Vertus, Pierre-Morains et Clamanges.

Mais le 135e régiment n'est relevé qu'assez tard par le 11e corps à Ecury-le-Repos. A 18 heures, ce régiment débouche de Morains-le-Petit. Près de la station, il est canonné par une artillerie qui paraît être entre Vert-la-Gravelle et Colligny. Il avance cependant, atteint Aulnizeux à la tombée de la nuit et continue sa marche, sans attendre son artillerie, qui ne l'a pas encore rejoint.

Dans la nuit, entre Aulnizeux et Vert-la-Gravelle, le colonel Eon rencontre les lieutenants de Persans et de Causans, du 10e chasseurs (42e D. I.), qui revenaient de reconnaissance. Ces deux officiers lui signalent de l'artillerie ennemie au bivouac au nord du château de la Gravelle. Le colonel Eon donne aussitôt l'ordre au bataillon de tête de faire un coup de main sur cette artillerie : « on ne devra tirer aucun coup de fusil », ajoute-t-il.

Le commandant Noblet fait prendre à son bataillon une formation en losange et se dirige à travers champs sur le château, guidé par un des officiers de cavalerie. Le reste du détachement suit sur la route. Au moment où il arrive à Vert-la-Gravelle, le colonel Eon entend le canon vers le nord, et, peu après, il voit revenir le commandant Noblet, qui lui rend compte de l'enlèvement des batteries ennemies. Les hommes sont enthousiasmés et rapportent des trophées. « Mais... les canons?... » demande le colonel.---« On les a laissés, puisqu'on n'avait pas d'attelages. » Ordre est donné d'aller les rechercher. Le bataillon repart; mais, quand il arrive, les batteries sont parties (26).

Pendant ce temps, le 2e bataillon du 135e continue sur Toulon-la-Montagne sans coup férir. Mais quand, vers le milieu de la nuit, le colonel Eon fera le tour de ses avant-postes, il trouvera ce bataillon arrêté devant la lisière est des bois, n'ayant pas osé, dans l'obscurité, s'engager à l'intérieur d'un bois dont il ignore la profondeur.

En dépit de ces incidents, la mission de cette avant-garde est presque remplie : elle occupe les positions qui lui ont été assignées; deux batteries ont suivi et sont établies, l'une au nord d'Aulnizeux, l'autre à la ferme de la Chapelle.

Le reste de la 17e division a occupé sans incident les cantonnements ou emplacements prévus.

* * *

11e CORPS D'ARMÉE.

D'après les ordres donnés à Chaintrix le 4 septembre, à 19 heures, le 11e corps doit, dans la journée du 5, continuer sa marche vers le sud dans les conditions suivantes : la 60e division, débouchant de Normée à 3 heures, se porte par Connantray dans la zone Villiers-Herbisse (Q. G.)---Herbisse---Allibaudières; la 22e division, utilisant la grand'route de Châlons à Troyes, débouche de Vatry à 4 heures, se dirigeant vers Sommesous et Mailly; son arrière-garde (un régiment d'infanterie, un groupe d'artillerie et un peloton de cavalerie), doit ultérieurement tenir le mamelon 190, au nord de Sommesous, Vassimont et Haussimont; la 21e division quitte Villeseneux à 5 heures; elle est suivie par l'artillerie de corps; elle se rend par Lenharrée dans la zone Connantre (Q. G.)---Semoine; son arrière-garde, de même force que celle de la 22e division, a pour mission, en fin de marche, de tenir le cours de la Somme à Normée, en portant un détachement à Lenharrée; les arrière-gardes doivent se retrancher sur leurs positions; le 2e chasseurs, se conformant au mouvement de l'arrière-garde de la 22e division, se dirige sur Sommesous pour surveiller les routes venant de Châlons.

Les mouvements s'effectuent normalement.

A la 21e division, la 41e brigade vient à Connantray, tandis que le 137e régiment d'infanterie reste à Normée et que le 93e est poussé à Lenharrée. Chacun de ces régiments est appuyé par un groupe d'artillerie et dispose d'une fraction de la cavalerie divisionnaire. Ils se couvrent, au nord de la Somme, par des fractions qui surveillent la lisière des bois. Les batteries se mettent en position, de façon à pouvoir battre ces mêmes lisières. Un des deux régiments de réservistes du corps d'armée, le 293e, est rattaché à cette division; il est arrêté à Semoine avec l'artillerie de corps.

La 22e division gagne la région de Sommesous, sans que son arrière-garde, le 19e régiment d'infanterie, ait à se déployer. Pendant que la division se rassemble, le 116e s'installe aux avant-postes au nord de Sommesous.

La marche s'est, effectuée presque entièrement de nuit, ce qui n'est pas sans aggraver la fatigue, déjà si grande, de ce corps d'armée.

Il nous paraît indispensable, pour comprendre les événements ultérieurs, d'insister sur cet état de fatigue. Prenons, à titre d'exemple, le 65e régiment d'infanterie (27). A cette date du 5 septembre, ce régiment a perdu ses trois chefs de bataillon et onze capitaines sur douze; il n'est plus encadré que par un capitaine et quatre lieutenants de l'armée active, et six lieutenants de réserve; ses effectifs sont néanmoins presque au complet, mais ils comptent un millier de réservistes débarqués à Rethel avec un encadrement très faible et qui, dès leur débarquement, ont été surpris par un tir d'artillerie qui les a mis en désordre. La retraite a été littéralement épuisante :

Le 28 août, après une journée de combats acharnés,---écrit le capitaine Dupuy-Fromy, alors sous-lieutenant...---nous marchons toute la nuit.

Le 29, retraite... Arrivée au cantonnement vers 22 heures, après une longue marche par très forte chaleur.

Le 30, départ au petit jour... Fortement accrochés par l'ennemi. Remise en ordre des unités réalisée péniblement à la nuit.

Le 31, longue marche dès le petit jour. Chaleur très forte. Cantonnement à la nuit tombée à Machault.

Le 1er septembre, départ au petit jour. Chaleur étouffante. Combat d'arrière-garde assez sévère... Bivouac à Pont-Faverger, à minuit.

Le 2, mêmes conditions... Je perds du monde dans un combat d'arrière-garde. Arrivée au cantonnement: minuit.

Le 3, mêmes conditions de marche. Chaleur torride après nuit très froide. A 15 h. 30, la brigade est engagée, au nord de Vaudemanges, dans un dur combat d'arrière-garde. Bivouac, à la nuit, entre la Marne et le canal latéral.

Le 4, surprise au petit jour, par les Allemands. Passage de la Marne dans des conditions très dures... marche, sans autre arrêt qu'une pause de trois heures, (le 3 heures du matin le, 4 à 2 heures du matin le 5.

Le 5 septembre, arrivée à 2 heures à Villeseneux. A chaque pause, les hommes s'écroulent sans même déboucler leurs sacs. Le manque de sommeil est devenu un véritable supplice. Depuis le 30 août, les caissons du 51e régiment d'artillerie portent, par intermittences et malgré les ordres, un certain nombre de fantassins, qui peuvent ainsi dormir.

A l'entrée de Villeseneux, le régiment fait une pause... et s'endort immédiatement tout entier. Je commande la deuxième compagnie de la colonne. J'ai donc, derrière moi, 10 compagnies. Je commets la faute de m'asseoir sur le côté gauche de la route, et m'endors aussitôt. Je me réveille quelques minutes après : plus personne sur la route. Tout le monde est dans un tel état de fatigue que personne ne s'est aperçu de l'incident. Ma compagnie a suivi la compagnie de tête; mon ordonnance a emmené mon cheval; les cadres des compagnies suivantes n'ont rien vu. Heureusement, le cantonnement est à Villeseneux même; je ne fais qu'un bond et arrive à temps pour cantonner mon unité.

Nous partons à 5 h. 30. Nous avons ainsi environ trois heures de repos après la terrible journée du 4...

C'est quand les unités sont installées que le 11e corps reçoit les ordres de l'armée arrêtant la retraite. N'ayant pas à modifier son dispositif, le général Eydoux se borne à notifier le changement d'attitude :
Les mouvements de retraite de nos armées sont terminés, écrit-il à la 21e division à midi. Demain, avec l'appui des corps d'armée nouvellement arrivés, l'offensive générale sera reprise. Comme dispositions préparatoires, le front du détachement d'armée, qui devient 9e armée, est porté sur la ligne de la Somme, prolongée vers le nord-ouest et le sud-est.

En conséquence, le 11e corps est maintenu sur ses positions de Sommesous à Normée.

L'ordre du commandant de l'armée est de conserver les positions coûte que coûte. On s'y organisera défensivement avec les outils qu'on possède et ceux qu'on réquisitionnera.

Le secteur de la 21e division s'étend du chemin de Vassimont à Montepreux exclu au chemin Normée, Connantray inclus.

... Le Q. G. du C. A. est maintenu à Semoine.

Faites connaître quel serait, le cas échéant, votre P. C.; qu'on étudie toutes les positions de l'artillerie, et dites-moi si vous auriez des emplacements favorables pour l'artillerie de corps.

Le commandant de l'armée vent qu'on explique à tout le monde, sans l'insérer dans les ordres, les raisons pour lesquelles on a dû céder du terrain, sans être pressé par l'ennemi. Il s'agissait, en réalité, de laisser l'armée de droite allemande s'aventurer de plus en plus et d'attendre le moment venu pour agir avec de puissants moyens contre elle.

Il est à présumer qu'en cas d'attaque par des troupes venant de Châlons, l'un de vos régiments serait pris en réserve générale.

Et à la 22e division :
... Le secteur de la 22' division s'étendra de la grand'route de Châlons inclus au chemin de Vassimont-Montepreux (inclus).

Le commandant du 2e chasseurs a signalé une colonne composée de cavalerie suivie de troupes d'infanterie à hauteur de Nuisement, marchant dans la direction de Vatry. Une attaque dans cette direction est donc à craindre. Il s'agit de la refouler. Ses forces seraient peu élevées.

Préparez vos positions d'artillerie et faites-en étudier pour l'artillerie de corps...

Il est superflu d'insister longuement sur l'évidente différence de la forme et du style de ces lettres avec la forme et le style des documents émanant du 9e corps : au 9e corps, des ordres nets, des comptes rendus brefs et précis; au 11e, on écrit plus, plus longuement et moins nettement! Il serait sans doute exagéré d'attribuer à cette différence dans les méthodes de commandement la différence d'attitude dans la bataille de deux troupes, par ailleurs comparables. Il y eut à cette différence d'autres causes, parmi lesquelles on ne saurait assez souligner la fatigue extrême du 11e corps et ses pertes en cadres. Mais il est impossible que ce contraste entre les méthodes de commandement, contraste que nous ne soulignerons plus, mais que l'on aura maintes occasions de constater dans les pages suivantes, ne se soit pas traduit dans l'exécution.

Le front dévolu au corps d'armée est considérable. La situation qui est ainsi créée paraît d'autant plus délicate qu'au nord-ouest, le général Radiguet, qui commande la 21e division, ne se sent pas en liaison avec le 9e corps, tandis qu'à l'est, le repli du 17e corps au sud de Humbauville, Meix-Tiercelin et Trouan-le-Grand découvre le flanc droit de la 22e division. Le général Eydoux ne voit cependant pas de moyen de parer au danger.

Le danger de la trouée à votre gauche ne m'a pas échappé, répond-il à 16 heures à un compte rendu de la 21e division; seulement le secteur du 11e Corps s'arrête à Normée, d'après l'ordre même de l'armée, et, d'un autre côté, mon front est déjà beaucoup trop étendu (12 kilomètres) pour qu'il me soit possible de porter un détachement entre Morains et Normée. Le danger est bien plus grand encore à l'aile droite, plus directement menacée par les attaques venant de Châlons, et qui ne peut compter sur l'appui du 17e corps, dont la gauche, à Trouan-le-Grand, est à 12 kilomètres en arrière. Mettez-vous en rapport avec l'aile droite du 9e corps, à Morains, et communiquez-lui mon désir de le voir s'étendre davantage vers sa droite. De la cote 172, votre artillerie bat sans doute le terrain dangereux entre les deux corps, Morains n'étant qu'à 5 kilomètres. Mais de l'infanterie serait, en effet, très nécessaire.

Comme je dispose, à l'aile droite, de l'artillerie de la 60' division, je pourrais, le cas échéant, mettre à votre disposition toute l'artillerie de corps.

Dans l'après-midi, vers 15 h. 30, un incident se produit, qui montre l'instabilité de ces troupes épuisées de toutes façons par les terribles engagements du début et par la retraite. Une batterie à cheval, précédée de quelques cavaliers, ouvre le feu sur Normée. « Après un léger flottement,---dit le journal de marche de la 21e D. I.,---les positions sont maintenues. » En réalité, il semble bien que Normée ait été momentanément évacué. Voici, en effet, ce qu'écrit le général Eydoux dans un compte rendu de 19 heures :
... Des éléments du 137e ont... rétrogradé au sud de Normée. C'étaient des éléments en réserve. Ils ont été ramenés sur leurs positions, et les unités du même régiment qui se trouvaient en avant de Normée sont restées dans leurs tranchées.
Cette panique d'éléments placés en deuxième ligne est fréquente à la guerre : les éléments qui sont en première ligne voient le danger; ils y font face. Les autres sont à la merci de leur imagination.

L'incident de Normée provoqua un échange de lettres :

La 42e brigade à Normée et Lenharrée,---écrit le général Radiguet au commandant de cette brigade à 18 h. 30,---ne semble pas se rendre un compte exact de l'importance de la mission qui lui est confiée et qui peut durer plusieurs jours.

Les tranchées établies devant les deux villages sont enfantines. On prendra tous les outils possibles dans les villages, et pendant la nuit, on les approfondira...

Qu'on organise, si on en a le temps, une deuxième ligne en arrière du ruisseau, soit! Mais il n'y a pas à étudier une position de repli, l'ordre de tenir à Normée et à Lenharrée étant absolument ferme, et la 42e brigade devant être soutenue par sept groupes d'artillerie et toute la 41e brigade.

Faire connaître dans les régiments, dès ce soir, que l'artillerie française tirera an besoin sur les troupes qui se débanderont.

Au moment où d'autres corps d'armée, à notre gauche, reprennent une vigoureuse offensive, ce n'est pas le moment de se déshonorer en abandonnant des positions que l'on peut avoir bien fortifiées. Si par hasard, les Allemands arrivent à faire des barrages avec leurs grosses pièces, il n'y a qu'à déplacer les lignes pendant quelque temps à droite ou à gauche et reprendre ensuite les anciens emplacements. Les hommes courent bien plus de dangers en se débandant qu'en restant dans leurs tranchées, surtout si celles-ci sont suffisantes.

A quoi le colonel Lamey répond, à 22 heures :
J'ai l'honneur de vous rendre compte que mes deux chefs de corps ont reçu copie de votre note de ce soir 18 h. 30. La 42e brigade se rend très bien compte de sa mission; mais elle a le devoir de rappeler encore une fois que, sur 24 compagnies, il n'y en a plus que 5 commandées par un capitaine, d'ailleurs seul dans sa compagnie, et qu'elle en a 13 commandées par des officiers de réserve ou des adjudants absolument seuls; que, sur son effectif, il y a 1.400 réservistes des dépôts communs ininstruits ou inertes; que, par suite, les officiers supérieurs sont obligés de tout voir et de tout diriger eux-mêmes, ce qui est long...
Dans la soirée, on se décide, pour assurer la liaison avec le 9e corps, à pousser un bataillon de la 21e division sur Ecury-le-Repos, et à 22 h. 30, comme nous le verrons au chapitre suivant, le général Eydoux envoie ses ordres pour modifier le dispositif du corps d'armée qui appuiera sur sa gauche.

En résumé, dans cette journée du 5 septembre, les différents corps de la 9e armée ont exécuté sans hésiter l'ordre de demi-tour qui leur était donné; mais leur état de fatigue et l'énorme étendue du front assigné à l'armée ne sont pas sans causer un certain trouble et quelque incertitude sur l'issue de la lutte qui va s'engager.

* * *

LES ALLEMANDS DANS LA JOURNÉE DU 5 SEPTEMBRE.

L'ordre du commandement suprême allemand, du 4, à 19 h. 30, amène le général von Bülow à modifier quelque peu la marche de son armée; au lieu de continuer sa progression vers le sud, il doit faire face au sud-ouest, en pivotant autour de sa droite à Montmirail et en lançant sa gauche sur Marigny-le-Grand. Il prescrit, en conséquence, au VIIe corps, qui est en deuxième ligne, de s'arrêter et d'attendre de nouveaux ordres; au Xe corps de réserve, de ne pas pousser au delà d'Orbais---alors qu'il aurait dû être vers Montmirail. Le Xe corps actif et la Garde ne reçoivent aucune indication nouvelle, puisqu'ils doivent aller jusqu'à la Seine et qu'ils sont en marche vers le sud. Vers midi, il envoie un nouvel ordre :

... L'ennemi semble encore en partie se retirer en désordre... De nombreuses localités autour de Vertus étaient encore occupées par l'ennemi.

La IIe armée doit continuer peu à peu sa conversion contre Paris, entre Marne et Seine, par l'occupation des passages sur la Seine entre Nogent et Méry. La IIIe armée a repos aujourd'hui et prend comme direction de marche Troyes et à l'est, tandis que, seuls, un peu de cavalerie et d'artillerie atteignent aujourd'hui Villeseneux et Coupetz. La IIe armée atteindra aujourd'hui dans sa poursuite Viffort, Vauchamps, Saint-Prix, Mont Aimé : VIIe C. A., au nord et à l'est de la route Château-Thierry, Montmirail, Orbais, aura repos.

Xe C. R., avec la 2e division de réserve de la Garde en avant-garde, atteindra Vauchamps.

Xe C. A. atteindra, avec sa colonne de droite, par la croisée des chemins à l'est de Fromentières, le Thoult; avec sa colonne de gauche par Congy, Saint-Prix et Villevenard.

La Garde atteindra Vert-la-Gravelle par Etréchy, Vertus et Bergères. Le Mont Aimé sera occupé. Liaison constante avec l'aile droite de la IIIe armée (28).

La marche se fait sans incidents; les différentes unités gagnent leurs cantonnements ou leurs bivouacs. La XIXe division s'installe à Fromentières, où une bombe d'avion tombe sur le bivouac du 1er groupe du 62e régiment d'artillerie, à Champaubert et Baye (Q. G.), couverte par ses avant-postes vers Le Thoult et Le Reclus.

La XXe division est au bivouac entre Etoges et Congy (Q. G.). Ses avant-postes s'installent à Saint-Prix, Villevenard, Courjeonnet et Joches, après avoir échangé quelques coups de fusil avec les Français.

La 1e division de la Garde stationne à Villers-aux-Bois, Chaltrait, poussant ses éléments de sûreté sur Soulières et Givry-lez-Loisy. Nous avons vu qu'une des unités de ces avant-postes est amenée, dans la nuit, à se porter jusqu'au château de la Gravelle, pour soutenir un détachement d'exploration surpris par les Français. La IIe division de la Garde atteint la région Avize, Oger et Vertus, couverte par ses avant-postes au Mont Aimé (29).

Le général von Hausen, en arrivant le 4 au soir à Bétheniville, a eu la satisfaction d'apprendre que les ponts sur la Marne sont intacts, mais il constate que ses troupes sont fatiguées et il décide de leur donner un jour de repos. Si cela se justifie au point de vue de l'armée saxonne, qui a beaucoup marché, étant tiraillée entre les armées voisines, au point de vue stratégique sa décision est discutable, car il abandonne la liaison avec Bülow et le duc de Würtemberg, dont les unités d'ailes pouvaient se trouver menacées.

Rien ne vient, dans la matinée du 5, modifier son impression ou sa décision. Des nombreux renseignements recueillis par la cavalerie ou l'aviation, il déduit que le gros des forces ennemies est transporté vers Paris et que la zone de Troyes est libre. Les éléments de toutes armes signalés par l'aviation ou la cavalerie aux abords et au sud de la route Fère-Champenoise---Vitry-le-François sont considérés comme des arrière-gardes. L'armée saxonne n'est donc pas au contact de l'ennemi. Un détachement d'exploration constitué avec les cavaleries des corps d'armée se heurte à des fractions de la 9e division de cavalerie au sud de Vatry et à des unités du 11e corps sur la Somme. Mais on est persuadé, au quartier général de la IIIe armée, que les colonnes françaises sont toujours en marche vers le sud et sont près d'atteindre la coupure de l'Aube (30).

Au soir cependant, la IIIe armée a poussé sa cavalerie jusqu'à Villeseneux et Clamanges, tandis que la XXXIIe division est à Athis, ayant remis de l'ordre dans ses unités, la XXIIIe division au repos dans la région Jalons---Matougues---Aigny. Le XIXe corps est autour de Châlons, dont les rues sont pleines de soldats de ses régiments. Le XIIe corps de réserve est encore très en arrière, sa XXIIIe division de réserve est au sud-est de Reims, à une journée de marche, tandis que la XXIVe division de réserve, encore plus au nord, s'est avancée dans la journée au sud-ouest de Rethel. Von Bülow est dans son quartier général, à Dormans; von Hausen est à Châlons, au milieu de son état-major; de là, tous deux vont donner leurs ordres pour la journée du lendemain.

Les ordres du général von Bülow pour le 6 prescrivent toujours la marche de l'armée la gauche en avant; ils sont donnés à 18 heures :

Le VIIe corps restera le 6 septembre, dans ses cantonnements, prêt à marcher. Liaison continue avec la Ire armée.

Les Xe C. B., Xe C. A. et la Garde atteindront avec leurs avant-gardes la ligne Montmirail---Marigny-le-Grand, comme il a été prescrit. Le Petit-Morin doit être franchi à 8 heures, sauf par le Xe C. R. La Garde et le Xe corps doivent pousser en avant des colonnes volantes (cavalerie, infanterie en camions, cyclistes, un peu d'artillerie et des mitrailleuses) dans la région de la Seine : Xe C. sur Villenauxe, Garde sur Anglure.

Reconnaissances d'aviation :

VIIe, Montereau, Sens;
Xe C. A., Sens, Aix-sur-Othe;
Garde, Troyes (31).

A peu près vers la même heure (32), von Hausen envoie ses ordres aux unités saxonnes. D'après les commentaires de l'instruction du général von Moltke, son armée peut être appelée à agir dans deux directions différentes. Tiraillée depuis le début de la campagne entre les IIe et IVe armées, elle va aller à la bataille de la Marne dans des conditions tout aussi défavorables. Il ne semble pas que von Hausen s'en soit préoccupé au début. Il est en retard d'une étape, il ne cherche qu'à regagner une partie du temps perdu. Les XIIe et XIXe corps vont d'abord pousser leur cavalerie le plus en avant possible. Le XIIe corps devra ensuite marcher sur Germinon et Coupetz le 6, et sur Poivres et Saint-Ouen le 7, tandis que le XIXe corps doit atteindre Loiz-sur-Marne le 6 et Margerie-Haucourt le 7. La division de tête du XIIe corps de réserve doit s'avancer le 6 à Villeneuve et le lendemain à Sommesous, pour être susceptible d'intervenir dans la bataille.


CHAPITRE IV --- La prise de contact (6 septembre)
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