Antonin Guillot
Le Camp Américain d'Allerey
(1918 --1919)

LES AMERICAINS DANS LA GUERRE(2)

1. DE LA NEUTRALITE A L'ENGAGEMENT

2. DE LA DECLARATION DE GUERRE A L'ARRIVEE DES PREMIERES TROUPES

3. L'INSTALLATION DES AMERICAINS EN FRANCE

4. LES AMERICAINS AU COMBAT


[B.D.I.C.]
Infanterie américaine sur le front dArgonne (septembre 1918).

DE LA NEUTRALITE A L'ENGAGEMENT
(août 1914 --- avril 1917)

Lorsqu'éclate la Première guerre mondiale, le 3 août 1914, le Président des Etats-Unis, Woodrow Wilson, définit une politique officielle, vis-à-vis de la France, comme des autres belligérants, marquée par le souci de respecter la plus scrupuleuse neutralité.

Mais si, en trois ans, d'août 1914 à avril 1917, les Etats-Unis passent de la neutralité à l'engagement, il faut en rechercher les raisons tant dans leur évolution économique que dans l'évolution de l'opinion publique.

La politique de blocus des Alliés, mal acceptée par les Etats-Unis, tendait à couper l'Allemagne de tout approvisionnement extérieur. Elle eut deux conséquences :

* le déclenchement de la guerre sous-marine par l'Allemagne
* le formidable développement des importations françaises provenant des Etats-Unis.

* La guerre sous-marine

Afin de forcer le blocus le gouvernement allemande prit, le 4 février 1915, la décision d'utiliser les sous-marins pour couler les navires qui se trouveraient dans la zone de guerre autour des îles britanniques.

En mars 1915, plusieurs bateaux sont coulés sans avertissement. Le 1er mai un cargo américain est envoyé par le fond. Le 7 mai, le "Lusitania", "le plus rapide et le plus grand paquebot en service sur l'Atlantique nord" est torpillé au large des côtes d'Irlande : 1198 personnes disparurent, dont 24 américains. Ce torpillage produisit un véritable choc aux Etats-Unis. Cependant, le Président Wilson refusa d'engager son pays dans le conflit.

Après des temps forts et des accalmies, les attaques des sous-marins allemands reprennent. Le 15 janvier 1917, l'Allemagne notifie au gouvernement américain sa décision de développer la guerre sous-marine à outrance, à compter du 1er février. Le 3 février, c'est la rupture des relations diplomatiques avec l'Allemagne, mais Wilson attendra un mois avant de franchir le pas décisif, voulant obtenir l'unanimité du peuple américain. Ce n'est qu'à la suite d'une tentative allemande d'alliance avec le Mexique contre les Etats-Unis que le Congrès, sur proposition du Président, décide de déclarer la guerre à l'Allemagne, le 2 avril 1917.

* Développement des relations commerciales France-Etats-Unis

Du fait de la prolongation du conflit les Etats-Unis sont devenus en 1916 le premier fournisseur de la France (produits alimentaires, textiles, aciers et matériel de guerre).

Il apparaît qu'entre 1914 et 1917 le jeu des circonstances avait amené les Etats-Unis à développer unilatéralement leurs relations commerciales avec les seules nations alliées. La guerre sousmarine signifiait la ruine du commerce d'importation américaine vers la France et la Grande-Bretagne. L'entrée en guerre des Etats-Unis répond donc également à ce défi économique.

* L'évolution de l'opinion publique américaine

Durant les trois années que dure la politique de neutralité, la conquête de l'opinion publique américaine par l'un ou l'autre des belligérants est un enjeu important. Toutefois, face au formidable développement de la propagande allemande, l'absence de propagande française est appréciée aux Etats-Unis.

Le moins instruit des Américains sait que la France a aidé son pays à devenir indépendant à la fin du 18ème siècle. Déjà avant la guerre La Fayette était plus ou moins vénéré comme un véritable héros national américain; avec le déclenchement de la guerre, on notera un regain d'intérêt et de reconnaissance à son égard. Et un même idéal anime les Etats-Unis et la France, nations démocratiques éprises de liberté.

* Les volontaires américains en France

Dès août 1914, la politique officielle de stricte neutralité est contestée par un certain nombre d'Américains qui désirent manifester leur sympathie pour la France et ses alliés. Trois types d'engagement en résultent :

* des engagements personnels dans les unités combattantes
* des actes de bienveillance et de générosité envers la France
* des engagements collectifs au service des armées.
* Les engagés volontaires dans les unités combattantes

En août 1914 , la colonie américaine de Paris lance un appel à l'engagement volontaire dans l'armée française. Mais pour un étranger, ce n'est possible que dans la Légion étrangère, ce qui explique le faible nombre de volontaires américains.

Début octobre 1914, les Américains de la Légion étrangère furent envoyés en campagne dans le secteur de Reims et en novembre ils comptaient leur premier tué. Certains quittent la Légion étrangère pour être incorporés dans un régiment français.

Parmi les légionnaires américains, plusieurs souhaitaient s'engager dans l'aviation. Après de longues démarches, un groupe d'Américains réussit à former, en avril 1916, avec l'aide de Français, l'Escadrille 124, l'"Escadrille américaine" basée à Luxeuil (Haute-Saône).

Elle fut dès lors affectée sur les différentes zones de combat. Cette période d'intense activité fut ponctuée de moments symboliques dont : le 6 décembre 1916, l'Escadrille prend le nom officiel d'"Escadrille La Fayette" ; le 4 juillet 1917 (Independance Day) une délégation de cette escadrille défile devant les statues de Washington et La Fayette, à Paris ; le 15 août 1917, l'Escadrille est citée à l'ordre de l'Armée.

Le 1e janvier 1918, l'Escadrille La Fayette sera intégrée dans l'Armée de l'Air américaine. Au moment où elle disparaît officiellement, son bilan est le suivant

* 267 Américains se sont engagés dans l'aviation française
* 255 ont reçu leur brevet de pilote
* 180 servirent au Front ;
* 66 moururent, dont 51 au combat
* 15 furent faits prisonniers
* 19 furent blessés ;
* 199 victoires furent officiellement reconnues.

* Les œuvres de générosité envers la France

En dépit de la politique de l'ambassadeur de France aux Etats-Unis qui consiste à ne jamais solliciter, mais seulement à remercier, les dons affluent à l'ambassade : vêtements, aliments, pansements, tabac, cadeaux de Noël pour les enfants, etc., offerts par un nombre considérable d'œuvres et d'innombrables particuliers.

Un comité américain de coordination et de distribution fut créé à Paris, ainsi qu'à New-York, bientôt épaulé par un Comité français. Ce comité américain avait pour rôle essentiel de faire connaître les besoins réels de la France et de ses alliés, de recueillir et de faire transporter les dons en nature, d'acheter et d'expédier les articles nécessaires avec l'argent versé.

Parmi les autres associations américaines créées pour porter secours à la France, il faut citer l'œuvre du "La Fayette Fund" qui s'est occupé d'envoyer dans les tranchées des "paquetages La Fayette" (30 000 "La Fayette Kits" pendant l'hiver 1914-1915 ; 75 000 acheminés de 1914 à 1917)...

* Les engagements collectifs américains au service des blessés

"De nombreux américains appartenant à des professions médicales ou simplement désireux d'aller soigner des blessés par dévouement et sympathie pour la cause française écrivent à l'ambassadeur de France dès les premiers mois de la guerre pour lui faire part de leur désir." (Y.H. Nouailhat).

... Mais devant les difficultés rencontrées pour être acceptées dans les services de santé, de nombreuses bonnes volontés trouvent à être employées au sein d'organismes de création purement américaines.

Un petit hôpital privé américain, fondé en 1910 à Neuilly-sur-Seine, offre d'accueillir des blessés de guerre. Offre qui aboutira grâce à une collaboration franco-américaine, à la création de l' "Ambulance" (hôpital militaire) américaine de Paris. Dès le 7 septembre 1914 les premiers blessés en provenance du front y sont admis ; ils sont 300 au début d'octobre et 600 en moyenne a partir de la fin 1915. Le personnel, exclusivement américain, comprend 16 médecins et chirurgiens, 40 infirmières qualifiées et une centaine d'auxiliaires. Des voitures légères vont chercher les blessés jusque sur le champ de bataille (une centaine en service en 1917). L'ambulance américaine créa en outre plusieurs hôpitaux auxiliaires où les convalescents achevaient de se guérir : 17 avec un peu plus de 2 000 lits.

L'ampleur de la générosité américaine provoqua l'organisation de plusieurs services d'ambulances automobiles. Au début de 1917, l'"American Ambulance Field Service" comptait plus de 200 voitures conduites par des volontaires. En avril 1917, le "Motor Ambulance Corps" possédait plus d'une centaine de véhicules , les ambulanciers avaient transporté en un an 28 000 blessés et ils participèrent à la bataille de Verdun.

* Le poids psychologique de l'engagement des volontaires américains

Au total, les volontaires américains dans les formations sanitaires ou combattantes n'ont pas été très nombreux. Mais il faut insister sur le fait que certains d'entre eux sont soit des écrivains soit des personnalités assez marquantes pour pouvoir faire publier le récit de leurs aventures dans la grande presse des Etats-Unis. Ces récits trouvèrent un écho assez considérable dans une opinion américaine avide de connaître, par le témoignage de ces jeunes volontaires, ce qui se passait réellement sur la ligne de feu.

La présence d'Américains dans les ambulances, dans la Légion ou l'aviation a également des répercussions sur l'opinion publique française. Des articles sont consacrés aux "volontaires américains morts pour la France", aux services rendus par les ambulances américaines sur le front.

Ces volontaires, dont beaucoup donnèrent leur vie pour la France et la victoire du Droit, contribuèrent à rapprocher les opinions publiques des deux pays.

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DE LA DECLARATION DE GUERRE
A L'ARRIVEE DES PREMIERES TROUPES
(avril - octobre 1917)

* La formation du corps expéditionnaire des U.S.A.

En avril 1917, Les Etats-Unis ne sont pas préparés à la guerre. La faiblesse numérique des forces armées s'explique par les difficultés de recrutement. Le service militaire obligatoire n'existe pas. Et cette armée souffre également de l'absence d'un véritable état-major.

Que pouvaient attendre les alliés de l'entrée en guerre d'un pays mal préparé ? Pendant plusieurs semaines cette question fut étudiée tant dans les sphères gouvernementales américaines que françaises.

En France existent deux positions. Celle de l'ambassadeur de France aux Etats-Unis qui opte pour une présence plutôt limitée des troupes et pour la concentration des efforts sur la fourniture d'armes, munitions, vivres, etc. Celle du président du Conseil, Paul Painlevé, qui préconise l'envoi de volontaires aussi nombreux que possible : de 300 à 500 000 hommes seraient bienvenus.

Mais la position de Painlevé impose la formation d'un corps expéditionnaire et nécessite l'établissement de la conscription et du service militaire obligatoire, ce qui ne fait pas l'unanimité de l'opinion publique américaine. Afin de "conquérir" cette opinion, une mission française conduite par le maréchal Joffre et le vice-président du Conseil, René Viviani, se rend aux Etats-Unis. L'accueil au vainqueur de la Marne fut extraordinaire de Washington à Chicago, de Saint-Louis à New-York (un million de spectateurs dans cette dernière ville).

Le succès remporté par la mission française a réduit l'hostilité à la conscription. Tous les hommes de 21 ans à 30 ans seront appelés sous les drapeaux. Mais au-delà de cette conquête de l'opinion publique, la mission permit de fixer avec précision le concours militaire américain.

Le 14 mai 1917 l'accord Joffre-Baker (secrétaire d'Etat à la Guerre) est signé. Il porte sur trois points :

1. Un corps expéditionnaire sera transporté en France peu après le 1e juin et comprendra 16 à 20 000 combattants. Le général Pershing est placé à la tête de l'American Expeditionary Force (A.E.F.);

2. ... L'instruction, commencée en Amérique, se terminera en France. Quatre divisions d'infanterie sont mises immédiatement à l'instruction.

3. Aussitôt que possible les Etats-Unis enverront 50 000 hommes appartenant aux unités techniques (service automobile, chemin de fer, routes, santé, subsistances, etc.).

"La présence sur le Front d'une division américaine représente pour les Français un immense réconfort moral, la promesse de renforts prochains et puissants. Dans l'esprit de Joffre, c'est aussi le début d'une étroite coopération entre les deux armées, la française qui traverse une terrible crise d'effectifs, l'américaine, encore inexpérimentée, qui devra s'organiser, s'instruire au contact des Français et leur apporter la réserve nécessaire. L'autonomie de l'armée américaine ? Oui, bien sûr, puisqu'il faut faire une concession à l'amour-propre national des Etats-Unis. Mais une autonomie qui sera toujours étroitement limitée. L'Etat-Major américain et le général Pershing pensent autrement"... (in André Kaspi, "Le temps des Américains, 1917-1918").

* Le concours économique des Etats-Unis

Si la France a lentement pris conscience de l'importance militaire des Etats-Unis, elle n'a jamais douté de leur concours économique.

Le 15 avril 1917, le Conseil des Ministres crée le Haut-Commissariat de la République Française à Washington, confié à André Tardieu, et qui sera un véritable ministère à Washington. Par le biais de nombreux organismes créés pour mobiliser les forces économiques des Etats-Unis, le Haut-Commissariat obtiendra un double concours: financier (des avances consenties à la France permettront d'acquérir les denrées alimentaires et les produits industriels qui font défaut) et économique (à partir d'avril 1917 l'aide apportée à la France va s'amplifier: en juin 356 731 tonnes importées par 75 navires, en août, 66 navires emportent 340 000 tonnes).

* "La Fayette, nous voici !"

Le général Pershing avait été désigné comme chef du Corps expéditionnaire américain le 19 mai 1917.

Le 13 juin il arrive en France avec 150 membres de son état-major, et le 26 la 1ère Division américaine commence à débarquer à Saint-Nazaire.

Dans ses mémoires, Pershing relate son arrivée à Paris

"Le voyage... a été réglé de façon à nous faire arriver le soir, après la fermeture des ateliers et des bureaux; ainsi, la population pourrait prendre part à la bienvenue improvisée. Ce qu'on voulait, c'est que les habitants vissent de leurs propres yeux que les Américains étaient réellement en train d'arriver".

A partir du 14 juin, le général Pershing multiplia les visites protocolaires et les réceptions. Les démonstrations qui accompagnaient ces visites répondaient à une volonté du gouvernement français d'amplifier cette première "bonne nouvelle" de l'année 1917. L'arrivée des Américains compensait l'échec de l'offensive Nivelle au "Chemin des Dames" et la défection de la Russie. Les manifestations populaires de sympathie connurent leur point d'orgue le 4 juillet 1917 (Independence Day).

"Les Français tenaient à honorer notre fête nationale et suggérèrent que quelques troupes américaines participent avec les leurs à la célébration de cet anniversaire. Le peuple de Paris n'avait pas encore vu de soldats américains et les autorités estimaient que, de les voir de leurs yeux dans les rues, serait d'un excellent effet sur le moral français...

La cérémonie qui eut lieu dans la cour d'honneur des Invalides fut une belle manifestation de reconnaissance pour notre entrée dans la guerre. Le Président de la République présida, accompagné du maréchal Joffre...

La première apparition des troupes de combat américaines dans Paris provoqua des explosions de joie dans le peuple. Dans sa marche jusqu'au cimetière de Picpus où est le tombeau de La Fayette, le bataillon fut accompagné par une foule énorme... Ces scènes émouvantes exprimaient avec une singulière vivacité les émotions d'un peuple auquel l'issue de la guerre avait semble presque désespérée...

Augmentation progressive des effectifs de l'armée américaine,
du 1" avril 1917 au 1" novembre 1918.
(DOSSIER OFFICE NATIONAL DES ANCIENS COMBATTANTS)

Courbes comparatives des effectifs américains aux Etats-Unis et en France, d'avril 1917 à novembre 1918.
(DOSSIER OFFICE NATIONAL DES ANCIENS COMBATTANTS)

(B.D.I.C.)
Au repos, dans une ferme de l'Est.

Au cimetière, la cérémonie consista en quelques discours... On m'avait demandé de prononcer une allocution; mais j'avais désigné pourparler à ma place le colonel CE. Stanton, de mon état-major..

C'est à cette occasion et devant ce tombeau que furent prononcés les mots mémorables qu'on ne pouvait trouver que sous le coup d'une profonde émotion, des mots qui vivront longtemps dans l'histoire : "La Fayette, nous voici !"... Ces mots, je crois pouvoir l'affirmer ont été prononcés par le colonel Stanton, et c'est à lui que doit revenir l'honneur d'une phrase si heureuse et si bien frappée".
(In Général Pershing : "Mes Souvenirs de Guerre")

* L'arrivée du Corps expéditionnaire

Entre le 26 juin et le 2 juillet 1917, un premier convoi de 19 navires débarque à Saint-Nazaire 14 750 hommes, 103 infirmières et 46 700 tonnes de matériel.

Malgré les espoirs mis dans ce premier débarquement, les effectifs du Corps expéditionnaire progressèrent très lentement. Au début du mois de novembre 1917, soit sept mois après l'entrée en guerre des Etats-Unis, celui-ci regroupe moins de 80 000 hommes, dont 50 000 combattants.

La faiblesse de ces effectifs s'explique par les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de la loi sur la conscription, par l'absence de plan d'organisation de l'armée américaine et par l'insuffisance du tonnage atlantique.

En France même, ce corps expéditionnaire à l'effectif réduit doit résoudre des problèmes complexes pour son installation.

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L'INSTALLATION DES AMERICAINS EN FRANCE
(juin 1917 -- novembre 1918)

* Le choix d'une zone de combat

A peine arrivés à Paris, le Général Pershing doit résoudre toutes les questions inhérentes à l'installation des troupes américaines en France et à leur préparation au combat.

Or, le choix des lieux d'installation est conditionné par le choix d'une zone de combat. Au moment où débarquent les premières troupes à Saint-Nazaire, les généraux Pétain et Pershing définissent ce qui sera le but des armées américaines : la réduction du saillant de Saint-Mihiel.

* La création de bases maritimes de débarquement

Le choix d'un port de débarquement fut la première décision que Pershing dut prendre en matière d'installation avant même que soit déterminé le Front américain.

Pour la qualité de ses équipements, le port de Saint-Nazaire fut choisi comme base de débarquement des premières troupes américaines.

Dès le 9 août 1917 une seconde base est créée à Bordeaux, puis en septembre commencent les travaux d'aménagement du port de Brest. Au total, entre juin 1917 et novembre 1918, l'Armée américaine utilisa pour ses débarquements en France 85 cales existantes et en construisit 83 nouvelles dans les ports français.

Plan de la gare régulatrice d'Is-sur-Tille.

Grande base avancée américaine n°1 d'Is-sur-Tille (Côte d'Or).

Les principaux ports utilisés tant pour les hommes que pour les approvisionnements furent les suivants :

* groupe nord ou de la Basse-Loire : Saint-Nazaire, Nantes, Brest ;

* groupe sud ou de la Gironde : Bordeaux, Bassens, Pauillac, La Pallice, Le Verdon

* groupe de la Manche: Le Hâvre, Caen, Grandville, Saint-Malo, Rouen;

* groupe de l'Atlantique: Les Sables d'Olonne, La Rochelle, Rochefort, Bayonne

* groupe de la Méditerranée : Marseille, Toulon.

Aux abords des ports les plus importants furent établis d'immenses magasins et zones de stockage: Montoire à l'arrière de Saint-Nazaire, Saint-Sulpice d'Izon près de Bordeaux, Miramas près de Marseille.

* La création de voies ferrées

L'ensemble des troupes et des approvisionnements débarqués dans les bases maritimes devaient être transportés jusqu'au front américain par voie ferrée.

Au printemps 1918, c'est 5 000 hommes et 10 000 tonnes de matériel qui empruntent chaque jour des voies ferrées placées sous contrôle américain depuis le 13 août 1917.

La première de ces lignes, dite "ligne Nord" part de Saint-Nazaire, passe par Nantes, Tours, Vierzon, Bourges, Cosne, Clamecy, Auxerre, pour aboutir à Saint-Dizier, puis vers le front. S'y greffent une ligne Brest, Le Mans, Tours, une autre de La Rochelle et Rochefort, à Niort et Saumur.

La seconde ligne, dite "ligne Sud", part de Bordeaux, passe par Périgueux, Limoges, Issoudun, Bourges, puis Nevers, Chagny, Dijon, Is-sur-Tille, pour desservir la région de Nancy, Lunéville, Saint-Dié, Belfort.

Parmi ce dispositif, on ne manquera pas d'évoquer, en Bourgogne, la "base fondamentale du Corps expéditionnaire américain, la grande base avancée n° 1 et sa gare régularisatrice à d'Is-sur-Tille, surgie en octobre 1917. Près de deux millions de soldats des U.S.A. et environ quatre millions de tonnes d'approvisionnements sont passés par Is-sur-Tille entre l'automne 1917 et et le printemps 1920".(3)

* La formation des soldats

La création d'installations américaines est un élément nécessaire à la venue du Corps expéditionnaire américain en France, corps dont il faut former les hommes. Cette formation à la guerre moderne se fit en Amérique et en France.

Aux Etats-Unis, se posa d'abord le problème de l'encadrement. Du 15 mai au 11 août 1917, 16 camps furent créés et 27 341 officiers y furent instruits. Mais on manquait de matériel moderne et les instructeurs étaient trop rares ; l'état-major américain dut faire appel à des instructeurs français (355) de toutes les armes, et britanniques (330).

Dégrossis aux Etats-Unis, les "sammies" pouvaient débarquer en France et accéder à un temps de formation aux côtés de l'armée française. Et dès le 30 juin 1917, la 1ère D.I.US est jumelée avec la 47è D.I. française, des camps d'instruction sont installés et demeureront en place jusqu'au 11 novembre 1918.

Pershing demande et obtient que les troupes du corps expéditionnaire américain fassent leur entrée dans un secteur du front, non pas progressivement mais en bloc, pour y jouer un rôle décisif souhaité par l'opinion américaine.

* L'équipement en matériel du Corps expéditionnaire

Le C.E.A. a reçu de la France l'essentiel de son armement (canons de 75, obusiers de 155/C, canons de 155/L, tanks, avions, fusils-mitrailleurs et mitrailleuses, fusils et cartouches, obus).

Equipé et formé, le Corps expéditionnaire pouvait rentrer dans la guerre.

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LES AMERICAINS AU COMBAT

* L'organisation du Corps expéditionnaire

Une division du C.E.A. comporte un total de 21 139 hommes, de 72 pièces d'artillerie et 260 mitrailleuses ou mortiers. Quatre divisions forment un corps d'armée.

En 1918, le corps expéditionnaire compte sept corps d'armée.

L'entrée des Américains dans les combats posera problème : l'Armée américaine devait-elle être indépendante ou être amalgamée aux divisions de l'Armée française ?

* La querelle de l'amalgame

Ce mot d'"amalgame" soulève les passions. C'était l'objectif français. Mais les Américains, soutenus par leur opinion publique, entendaient constituer une armée purement américaine.

Suite à des négociations directes entre Pétain et Pershing, un terrain d'entente est trouvé. Le 23 décembre 1917 Pershing accepte que la 1ère D.I.US entre sur le front pour relever les unités françaises. Le 16 janvier 1918, il accepte que quatre régiments soient instruits aux côtés d'une division française. Il prendra dès lors la liberté d'apprécier si la situation militaire nécessite un amalgame par division, brigade ou régiment.

De novembre 1917 à novembre 1918, les situations d'amalgame furent les plus nombreuses. Sur les 17 opérations dans lesquelles les troupes américaines furent engagées, deux seulement furent spécifiquement américaines : Saint-Mihiel et Meuse-Argonne, mais d'une importance capitale.

* Les principales opérations militaires des Américains

* 2 et 3 novembre 1917 : combats à Barthelemont (région de Lunéville) ; première attaque des troupes américaines (un bataillon), trois soldats sont tués (les premiers du C.E.A.) ;

* 10-20 avril 1918 : combats de Seicheprey (Meuse) qui ont eu des conséquences politiques importantes (ils justifient aux Etats-Unis, le lancement de l'emprunt de la Liberté) ;

* 28 mai 1918 : offensive victorieuse de Cantigny (région de Montdidier). C'est une première consécration de la valeur du C.E.A. et de bon augure pour l'avenir ;

* 27 mai - 27 juin 1918 : combats victorieux de Château-Thierry, de Bourresches, le Bois Belleau (région de Reims).

Les divisions américaines prendront part, amalgamées aux divisions françaises, aux batailles de juillet et août 1918.

Du 12 au 14 septembre 1918, c'est la bataille américaine pour la réduction de Saint-Mihiel, où 550 000 hommes sont engagés ; la victoire de Saint-Mihiel est un grand succès et relève le moral des Français. Pershing l'emporte, définitivement sur les partisans de l'amalgame. "Par son dynamisme, par ses qualités, par son encadrement, le Corps expéditionnaire est devenu un facteur décisif du conflit" (André Kaspi). Et aux Etats-Unis la fierté est grande.

Dans la bataille de la Meuse-Argonne où 1200 000 hommes sont engagés, du 25 septembre au 11 novembre 1918, les combats sont difficiles, mais l'ennemi recule. Le 1er novembre, l'armée américaine attaque entre l'Argonne et la Meuse, le 11 novembre elle est aux portes de Sedan.

Carte remise aux soldats à leur départ d'Amérique.


LES CENTRES HOSPITALIERS AMERICAINS

Table des Matières